Des mots

Quand le vent en furie,
tenace,
à contresens,

Le tigre enhardi
Brave,
toutes griffes dehors

MC, 2 décembre 2021

(Dérivation orientale -très modeste- à partir de la fable « Le chêne et le roseau » de La Fontaine (22è fable, livre I, Fables, 1688), des peintures de Hokusai et de la vie)

Photo @Hokusai, Tigre dans la neige

Au matin de nos jours qui se rencontrent enfin 
et esquissent, et projettent, et rêvent de chemins
par-delà les cloisons surmontées d'aubépines


L'oiseau-lyre superbe, quand Orphée erre encore,
à l'heure grise, le soir où enfle la mémoire,
siffle d'avenir fou les fils ténus des Moires


Dans ton regard offert à un monde parjure
tant de fois oublieux de ton nom, plein des tiens, 
une profonde aurore où s'abîment les cieux


et ce jour encensé de soleil et de bois
où s'intimident les feuilles, les oiseaux fabuleux,
l'univers chamboulé par tes notes soudaines


comme une pluie marine au plus fort du désert.

@MC 22 mai 2021, publié dans la Revue Pojar, numéro 10 de mai 2021

Quand les mânes muets qui habitent nos murs et pénètrent nos vies comme des proies faciles : combat de l'existence 

que sont les heures qui passent face à tout ce qui fige et s'infiltre sans détour car le sceau déposé soubassement de nos volontés vives impulsions vœux fort(s) pieux de s'en déraciner

le temps n'efface pas les mots résonnent encore et vibrent les résolutions faussées

les cercles resserrés ouroborent le passé où l'énigme empoigne ce jour revenu qui renaîtra même naïf d'un espoir étrenné de poussière


par-delà, cependant, l'ancestrale joie éclaboussure de printemps 
et ta main dans la mienne
un présent

@MC 22 Mai 2021 / texte publié dans la Revue Pojar, numéro 10




Et la vie rien n’est su que l’étoile inconstante
que l’on fixe ardemment comme un pavillon sûr,
découvreurs bien en tête d’un monde-neige nue, 
que pas un, parmi des milliards pourtant, 
n’a marqué de son nom.
 
Quand, par derrière, des signes authentifiés frappent 
le réel comme une monnaie bien sonnante 
où trébuchent des rêves devenus un peu fous, 
le regard projectile nous aventure encore.
 
Et sur une eau d’ardoises sommeil de Léviathan, 
les cartes sont jetées large comme les aléas
suspendues aux soupirs de cartomanciennes.
Mais l’homme à la page gommée des contours du monde
Sagesse de l’horizon
 
 

@MC 20 mai 2021

Fourth of Henry Holiday’s original ilustrations to « The Hunting of the Snark » by Lewis Carroll. From Fit the Second: The Bellman’s Speech

 
En un rêve un peu vain
peuplé de Danaïdes,
désirer ardemment
tenir, retenir, même,
ce qui,
flot,
se dérobe
 Mais quand la mer
Blanche,
par nature
insoupçonnable,
chuchote
en haut lieu
des mystères éternels,
 nos mémoires externes,
tentacules fixes,
évident le réel,
le dérident :
résidu nu, artifice,
rien ou peu
ne s’y risque
 Ni le son,
même grave,
que l’on pensait fiché
pour toujours
au plus clair
de nos jours
alouettes en portée
 Ni l’odeur
capitale d’existence,
envahissement
du monde,
et preuve
sans détour
de l'Autre
 
Ni l’image
singulière
échappée vive
en un bouleversement
neuf
modifiant
tous les caps.
 Les souvenirs 
astiqués
comme des trophées morts,
à distance de tout,
là où la traque
sans fin
épouse la vie
 En mobile de l’être. 

@MC 15 Janvier 2021

Au coin, la flamme
crépite encore,
rouge,
lueur sourde des foyers


Tout


pantomime d'une nuit,
tombée
à peine apparue,
comme le rideau se ferme 
sur des scènes 
vues, lues, vécues,
à jamais sibyllines.


Les corps lâches,
appesantis 
dans la tendresse de lits,
invitent les ombres
aux luttes inconscientes
des esprits
libres - croient-ils.


Les herbes folles
ploient
sous la neige rêvée -
la pluie, plutôt,
réalité
copieuse,
mais


fléchie,
elle-même, 
sous le son sec et las,
au rythme des cordes 
(semblables, paraît-il)
qu'elle jette en pâture
à ce qui s'ignore encore.


Là où dégoutte
la mélancolie feinte
de chants incapables
de sens, 
le silence
se terre
et attend :
 
Ici frémit l'existence.


@MC le 28 décembre 2020

Un nouveau poème vient de paraître dans la nouvelle revue internationale littéraire et artistique Revue Pojar, aux pages 46 à 48.

Ce texte part de cette photographie de la rivière russe Oka.

Pourtant, tout semblait lumineux aujourd’hui, des feuilles jusqu’au ciel !

Dans ce calme de mardi endimanché jusqu’aux tréfonds, où rien ne frissonne sauf les rêves un peu transis, les imaginations molles, où coule le temps auprès de fenêtres, entrouvertes peut-être, sur la vie, sur l’avant – entendre les projets, cela va de soi -, même les nuages blancs n’osent passer trop officiellement.

Un oiseau égaré lance quelques notes vives, toutes pattes liées, cependant, à l’arbre qui, malgré lui, de haute lutte, perd ses plumes.

Bientôt la nuit, bientôt le jour, fusion des hémisphères, en somme. Et s’orienter quand même, vers l’est bien sûr, ou l’ouest, perdus de vue, le nord, le sud, confisqués, dans l’espace désert de mouvement.

Retrouver la mesure.

@MC 3 novembre 2020

Puisque tu as surgi d'une étoile lointaine
d'où les lucioles naissent,
où se dessinent les vents
et pleuvent à plein torrent les possibles de l'être,

Puisque ton regard plein
les transforme encore, et demain, toujours, même,
par-delà les éclairs,
en étincelles vives

Reste - si tu le souhaites -
auprès de moi longtemps.

Ensemble sur le ressort du monde,
Nous tisserons des aubes caravelles
Qui nous porteront loin,
Au-delà de nous-mêmes,

Nous désalignerons les astres trompeurs
qu'on nous vantait indétrônables
Et nous rirons artistes,
De mots sérieux jonglés comme lumière
Sera.

@MC 19 octobre 2020

Lucidité : point de départ. 

Lumière brute, sans phare, 

en qui recule l’ombre 

traquée jusqu’aux ténèbres

où le doute lui-même 

rongé par des angoisses 

panoptiques 

s’incline 

comme l’illusion,

inexorablement,

se perd, 

Regard-éclair définitif,

voire assassin,

et la vérité 

crue,

comme un fruit d’évidence :

un plein soleil

irréversible.

Le jour se lève.

Enfin.